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Souvenirs de quarts victorieux avec Puigségur, Golić et Richardson

Montpellier - Publié le 22 avril 2024 à 00h00
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"Montpellier est à sa place : parmi les huit meilleures équipes européennes". Les mots sont pesés, pensés, réfléchis. Ils sont d'Andrej Golić, vainqueur de la première Ligue des champions du MHB en 2003. Tout comme Laurent Puigségur et Melvyn Richardson dont leur point commun est d'avoir disputé au moins un quart de finale avec le Montpellier Handball. À deux jours du premier round contre Kiel en quart de finale de Ligue des champions, Laurent Puigségur, Andrej Golić et Melvyn Richardson se livrent sur leur expérience dans le Top 8 européen. 

2003

Laurent Puigségur (joueur du MHB de 1990 à 2006) :

"On aborde la double confrontation en quart de finale de Ligue des champions en fonction de l'adversaire que l'on a. On savait qu'on allait à Zagreb à l'aller. On connaissait l'ambiance qu'il pouvait y avoir dans la salle. Dans les discours, il fallait qu'on soit concentré et rester lucide sur le premier match pour ne pas avoir de retard voire un peu d'avance pour le match retour à Bougnol (maintenant FDI Stadium). Ce que je me rappelle du match, c'est la grosse bronca sur nos joueurs ex-yougoslaves, Mladen Bojinovic et Andrej Golić. C'était extrêmement dur. Il y avait des mots que l'on ne comprenait pas mais qu'eux comprenaient et qui étaient assez difficiles à entendre. C'était très violent. Les Français ne comprenaient pas ce qui se passait, mais nos amis des Balkans comprenaient tout. Pour eux, c'était un moment extrêmement hostile. Ce que je me rappelle aussi, c'est le but entre les jambes à deux ou trois secondes de la fin de match de Renato Sulic sur un coup-franc direct. Ils égalisent sur cette action. On repart de là-bas avec le match nul. On est relativement satisfait et on sait qu'on devra faire le "boulot" au match retour. L'idée de ce match aller, c'est d'avoir toutes nos chances pour le match retour qui s'est très bien passé avec une qualification facile pour les demi-finales."

"Pour aborder ce quart de finale, ce serait vraiment une erreur de changer une routine instaurée depuis un certain temps. Je n'ai pas souvenir d'une préparation particulière avant le quart de finale, mais je pense que l'on a fait une semaine de préparation relativement normale. Il y a dû avoir un peu plus de rigueur, un peu plus d'exigence au niveau des entraînements, mais je pense qu'on a continué à travailler comme on le faisait."

"C'est vraiment bien. Ce n'était pas l'équipe la plus armée de la poule, mais ils s'en sont bien sortis. J'ai vu trois ou quatre très gros matchs de leur part dont le déplacement à Barcelone. J'ai vu une petite différence entre le championnat et la coupe d'Europe. J'ai trouvé beaucoup moins de temps faibles sur les matchs de Ligue des champions que des matchs de championnat. Ce que je trouve admirable, c'est qu'avec toutes les blessures, le staff et les joueurs ont réussi à trouver à chaque fois des stratégies et un jeu qui a pu les faire gagner. Quand tu te retrouves sans Villeminot, Hesham, Skube... À un moment donné, il y avait une ribambelle de blessés, mais ils ont réussi à se qualifier pour les matchs à élimination directe. Ils font une très belle campagne européenne. Maintenant, tout peut arriver à ce niveau-là..."

"Actuellement, Kiel n'est pas l'équipe monstrueuse des années 2000. Ils ont une salle... Une des plus belles où j'ai pu jouer. 10.000 abonnés, que des personnes qui connaissent le handball. Ça crie dans tous les sens. Depuis vingt ans, Kiel fait partie du gratin européen. Ils n'ont pas pléthore de joueurs mais par contre ils ont des "top players". Dans ce type de situation, c'est du 50-50. Pour moi, l'avantage de recevoir est important dans ces confrontations. J'ai vu des matchs du MHB qui laissent beaucoup d'espoirs pour la suite."

"Je pense que ça va être la gestion des temps faibles et des temps forts. Quand tu es en réussite et que tout se passe bien, il faut vraiment acculer l'équipe adverse dans ses derniers retranchements. Par contre, quand tu n'es pas bien, que ça ne roule pas et que tu n'arrives pas à gérer le match, il faut être capable de changer de rythme et remettre la marche avant. Cette gestion des temps faibles et des temps forts peut vraiment faire la différence. Je pense que les deux équipes sont assez proches. Les money time sur les fins de mi-temps sont importants. Le dernier point, aussi, c'est la performance des gardiens qui est impactante sur ce genre de double confrontation."

2005

Andrej Golić (joueur du MHB de 1992 à 2006) :

"À cette période, Flensburg est l’une des plus grosses écuries du championnat allemand. On avait gagné la Ligue des champions, le rapport de force était plutôt équilibré. Le match aller fait partie des trois meilleurs matchs de l'Histoire du club à la maison. Les joueurs de Flensburg ont pris peur, on leur a mis des "claques". Tout était aligné pour que l'on fasse un top match. C'était la défaite la plus lourde de Flensburg depuis de nombreuses années. En gagnant de + 14, tu te dis : "Qu'est-ce qui peut t'arriver ?". On se disait pendant la préparation de faire attention quand même mais on était trop confiant. On aborde le match retour avec une équipe en face qui se dit perdu pour perdu autant y aller. Ils commencent à bien jouer. On a donné de quoi renverser la rencontre dans une salle de 6.000 personnes qui ne demandent que ça. On avait de l'eau qui commencer à rentrer de partout. C'est tout le contraire du match aller : aucun joueur est au niveau. Il n'y a pas un joueur pour sauver l'autre. On passe complètement à travers. Patrice a essayé un nombre incalculable de changements. Au final, j'ai fini arrière gauche et Greg (Anquetil) arrière droit. On était tous perdu aussi bien sur le terrain que sur le banc. Ce qu'il s'est passé à la fin, c'est inimaginable. Le but de Greg sur coup-franc protégé en toute fin de match, il est impossible à mettre. On fait une dernière action où on décale Mika (Guigou) à l'aile qui saute. Il y a penalty mais les arbitres hongrois ne nous le donnent pas, certainement pris dans l'ambiance. Il y a "Péguy" (Laurent Puigsegur) qui a un brin de lucidité pour nous laisser tirer le coup-franc protégé complètement à l'aile gauche. On a déjà Bojinovic qui est en train de se battre avec un autre joueur sur le banc, on a une cinquantaine de supporters qui sont déjà rentrés sur le terrain pour fêter la victoire. Le temps d'évacuer, ils nous laissent tirer. Je prends la balle et je la donne à Niko (Karabatic), le seul qui avait suffisamment de puissance pour tirer de neuf mètres complètement à l'aile gauche. Sauf qu'il y a Greg qui arrive et qui dit : "Moi, je vais la mettre !" Je lui donne la balle. On a joué quatorze ans ensemble et Greg tu le vois faire des choses dont tu as envie de l'égorger et d'autres où tu as envie de l'embrasser sur la bouche parce qu'il tente des choses improbables dont beaucoup ont échoué. Et c'est parce qu'il a beaucoup loupé dans sa carrière et nous a énervé qu'il a pu réussir dans les moments décisifs. Donc il la prend à une main. Il met la balle sous le maillot pour la mouiller car il savait comment il allait mettre le but. Il voulait que la balle glisse plus rapidement au rebond. À - 14, tu es éliminé, il faut être Greg pour réfléchir à tout ça. Si je lui ai filé la balle, c'est que moi aussi, je dois être jobard pour ne pas l'enlever de Niko et la donner à Greg. Ce but-là j'en ai jamais revu et j'en verrai pas. C'est l'ascenseur émotionnel. D'un coup, tu passes d'un cirque de 6.000 personnes sautant partout à un cimetière. C'est le plus gros ascenseur émotionnel de ma carrière. Je n'ai jamais fêté autant une victoire."

"Avant les quarts de finale, tu effaces tout ce qui a été fait précédemment. La particularité de la double confrontation, c'est que rien n'est perdu après le premier match. Il faut faire en sorte de l'aborder dans les meilleures conditions possibles pour le second match. Le fait de recevoir le match retour était avantageux avant, maintenant, ça s'est effacé. L'arbitrage, le jeu, beaucoup de choses ont changé. Parfois, le fait de jouer à domicile peut être un poids. Cet avantage n'existe plus vraiment. Le ballon est lourd pour le match retour quel que soit le score du premier match. Tu n'as pas le temps de changer de routine, c'est une ânerie de changer les habitudes. En revanche, la préparation tactique et la préparation mentale sont un peu plus intenses la semaine avant le quart de finale. Tout le monde est un peu plus concentré, "énervé" dans le bon sens du terme. Des quarts de finale de Ligue des champions, tu n'es pas sûr de les jouer tous les ans. Il y a une petite pression supplémentaire car il y a le Final 4 derrière. Probablement qu'on aura une surprise cette année."

"Le parcours de Montpellier en Ligue des champions est pour l'instant excellent. Avec les blessures de Villeminot et de Hesham, tu as considérablement réduit tes rotations. Il n'y a pratiquement que Valentin Porte qui est utilisé en arrière droit. Tu tournes qu'à quatre arrière. Il n'y a pas d'autre équipe qualifiée en huitièmes de finale qui est aussi limitée sur la base arrière. Même si tu te fais éliminer contre Kiel, c'est une note plus que satisfaisante en Ligue des champions. Montpellier est à sa place : parmi les huit meilleurs d'Europe."

"Kiel est une équipe vieillissante. Je pense que beaucoup de joueurs sont restés un peu trop longtemps. Ce sont des joueurs de grande qualité. Ils se sont un peu renouvelés mais sur la durée avec la Bundesliga et la Ligue des champions, l'équipe aurait mérité un petit coup de rajeunissement. Maintenant, si tout l'effectif est apte, c'est une équipe qui peut être championne d'Europe. Elle ne produit pas un jeu qui peut faire peur à Montpellier. Sur la durée des deux confrontations, leurs rotations vont être difficiles à gérer. Montpellier a bien réussi à le faire contre Zagreb. Contre Kiel, ça va être un peu plus compliqué mais ils ne font pas partie des favoris. Pour moi, c'est Magdebourg, Vezprém voire Barcelone. Montpellier a un coup à jouer face à Kiel."

"Je pense qu'il faudra maîtriser le rythme de jeu. Il faudra pendant 120 minutes appuyer là où ça fait mal tout en sachant que tu ne pourras pas tenir ce rythme pendant 120 minutes à cause des rotations. Sur la double confrontation à Zagreb, il y a eu des moments où Montpellier aurait pu vraiment faire mal, ce qu'il n'a pas réussi forcément à le faire. Ils l'ont fait sur les quinze dernières minutes à Montpellier. Le second critère est la performance des gardiens. C'est toujours une affaire de rythme de match et de gardiens."

2018

Melvyn Richardson (joueur du MHB de 2017 à 2021) :

"On sortait d'une performance incroyable en huitième de finale face à Barcelone qui était le grand favori de cette compétition. Je pense que Flensburg s'attendait pas à nous jouer. On est arrivé avec nos armes en quart de finale, le premier pour moi. C'était aussi ma première fois dans la salle de Flensburg. On sort un match plutôt correct où on a accroché le match nul là-bas qui nous met dans de bonnes conditions pour le match retour à la maison. Ce match retour a été un moment exceptionnel pour moi car c'était la seule fois où j'ai joué dans une Arena pleine avec une ambiance incroyable. Le match a été fou. On a vraiment été très fort en défense avec Vincent (Gérard), dans les cages qui a été exceptionnel. On a su réaliser un match de malade et finir sur un très gros score qui en a surpris plus d'un. On a joué avec énormément de plaisir, énormément de détermination. Pour ma part, je me sentais bien physiquement, je me sentais bien dans cette équipe. Je me devais de faire mon job, d'aider au maximum mon équipe pour décrocher cette victoire. C'était un très beau moment. J'avais toute ma famille dans les tribunes en plus."

"Les quarts de finales sont un moment charnière. Ça te qualifie direct pour le Final 4 qui est un week-end assez exceptionnel. C'est la dernière marche pour y atteindre. Il n'y a presque pas de favoris. Ce sont des gros matchs, contre des grosses équipes. C'est important de réaliser un bon match aller. Il faut bien préparer les deux matchs pour se mettre dans les meilleures conditions. Pour chaque match, je garde la même concentration, la même préparation que ce soit un match de championnat ou un quart de finale de Ligue des champions. Je n'ai pas de routine particulière, chaque match a un enjeu différent. En tant que compétiteur, tu as envie de tout gagner. Si tu te prépares bien, tu te mets dans les meilleures conditions pour faire un bon match."

"Le parcours du MHB en coupe d'Europe est très positif. S'ils ont réussi à se qualifier en quart de finale, c'est qu'ils ont réalisé une très belle Ligue des champions. Je suis super content pour eux. Ils ont une très belle équipe qui fonctionne très bien et qui a l'air de bien vivre ensemble. Ils ont les qualités pour faire déjouer les plus grosses équipes."

"Kiel est l'une des meilleures équipes au monde. Elle est très souvent présente dans le dernier carré de Ligue des champions. C'est un très gros calibre pour Montpellier. Ils ont réalisé une très grosse saison en Ligue des champions, ils ont fini premiers de leur poule. Cette année, ils sont irréguliers au niveau des résultats car ils ont un championnat très dense. Je connais la qualité de Kiel et je sais aussi que le quart de finale est un moment important pour eux. Ils voudront faire le meilleur résultat possible lors du match aller à Montpellier pour être dans les meilleures conditions lors du match à la maison."

"Le staff et le coach l'ont sans doute. Je pense qu'ils vont bien se préparer tactiquement et mentalement pour aller au combat. Le MHB l'a déjà fait. Ils ont déjà gagné des matchs à enjeu et déjoué des très grosses équipes européennes et encore cette année. Je ne serai pas surpris s'ils réalisaient une grande performance en quart de finale."

Cet article est également disponible sur Montpellier Handball - Site officiel